Suivi énergétique : améliorez vos processus

9 minutes29/11/2022

En raison du changement climatique et des défis politiques et sociaux actuels, il est nécessaire de réduire autant que possible la consommation de ressources limitées. L'identification des implantations à forte consommation d'énergie est donc très importante pour les entreprises.

Pour y parvenir, la mise en place d’un processus de planification et de suivi énergétique est nécessaire. Ce processus commence par la définition des utilisations énergétiques significatives (UÉS). Elles sont ensuite évaluées à l'aide d'indicateurs de performance énergétique (IPÉ) et contrôlées en permanence grâce au suivi énergétique. Le plan d'action qui en découle fixe des objectifs concrets de réduction de la consommation. La norme internationale ISO 50001 pour le management de l'énergie fournit des indications claires sur la structure et la mise en œuvre d'un processus de planification énergétique dans le cadre du cycle Planifier-Faire-Vérifier-Agir. Découvrez dans cet article comment procéder et ce qu'il faut considérer.

Planification stratégique : analyse des risques et des opportunités

La planification stratégique comprend une analyse complète des risques et des opportunités. Elle permet de préparer l'organisation à des événements futurs négatifs ou positifs. Les risques techniques peuvent par exemple résulter d’un manque d'entretien ou d’un entretien inadéquat des dispositifs consommateurs d'énergie. Si cela entraîne une usure accrue, ces systèmes pourraient alors consommer davantage d'énergie. La norme indique que la planification stratégique doit également intégrer les risques contextuels et ceux liés aux parties prenantes (par exemple : le non-respect des conditions d'autorisation).

Evaluation des risques

Une manière avérée d'évaluer les niveaux de risque est d'estimer la gravité des dommages et la probabilité d'occurrence pour ensuite effectuer le calcul (gravité des dommages * probabilité d’occurrence = évaluation du risque). Cette évaluation peut être quantitative (par exemple, des dommages s'élevant à 300 000 euros) ou qualitative (par exemple, par niveau : faible, moyen ou élevé), étayée par des critères spécifiques (élevé = menace pour l'activité, dommages > 1 million d'euros).

Afin de réduire ou d'éviter les risques, ce score de risque permet ensuite d'établir des priorités et de définir les mesures correspondantes.

Planification tactique : évaluation énergétique

La planification tactique se concentre sur l'analyse de l'état actuel du système énergétique, également appelée évaluation énergétique. Elle sert de base à l'élaboration d'indicateurs de performance énergétique (IPÉ) et de valeurs pour la situation énergétique de référence (SER), dont la comparaison permet l’identification des différentes améliorations. L'objectif de l'évaluation énergétique est d'identifier les utilisations énergétiques significatives (UÉS). Il s'agit des utilisations énergétiques qui représentent un pourcentage élevé de la consommation ou qui disposent d’un fort potentiel d'amélioration de la performance énergétique. L'entreprise définit ses propres critères pour déterminer ses UÉS. Par exemple : tous les postes dont la part de consommation d'énergie est supérieure à 5 % sont considérés comme des usages énergétiques significatifs. Pour que cette analyse aboutisse, les entreprises doivent mesurer ou estimer leur consommation d'énergie actuelle et l'attribuer proportionnellement aux systèmes ou processus correspondants.

Diagramme énergétique de Sankey

La meilleure manière de visualiser les flux énergétiques est le diagramme de Sankey. Toutefois, cela nécessite un concept de mesure cohérent afin que l'évaluation énergétique puisse être répétée régulièrement et toujours dans les mêmes conditions. Une collecte de données précise est la base des prévisions en matière d'utilisation et de consommation de l'énergie.

Analyse de régression : déterminer les facteurs pertinents

Outre les consommations, les entreprises doivent également déterminer les variables pertinentes affectant l’usage et/ou la consommation ainsi que les personnes qui exploitent ou travaillent sur chaque UÉS. Ces variables comprennent les facteurs qui ont une influence importante sur l'utilisation, la consommation et l'efficacité de l'énergie et qui ne changent pas régulièrement (comme les conditions météorologiques et la température). Une simple analyse de régression linéaire est un moyen de déterminer l'influence d'une variable et de vérifier les corrélations. Dans un diagramme de tendance linéaire, le coefficient de détermination R² pourrait être un critère permettant d'évaluer le degré d'influence (c'est-à-dire qu'une variable est pertinente lorsque R² > 0,95).

Exemple pratique : analyse de régression

L'entreprise Controbax examine la variable volume de production et souhaite étudier une éventuelle corrélation avec la consommation d'énergie. Pour ce faire, elle représente les deux variables en conséquence (axe des X) sur l'année (axe des Y).

Dans certains cas, la corrélation entre la consommation d'énergie et les variables n'est pas linéaire. Il est également possible que deux variables indépendantes ou plus soient corrélées (ce que l'on appelle la colinéarité). La détermination et l'évaluation de l'influence des variables pertinentes ont pour but d'ajuster les indicateurs de performance énergétique afin de permettre la comparaison des valeurs recueillies sur une période de plusieurs années (normalisation).

Définir les indicateurs de performance énergétique (IPÉ)

L'analyse de régression permet de définir les indicateurs de performance énergétique (IPÉ) correspondants aux utilisations énergétiques significatives (UÉS). Les IPÉ peuvent exprimer des mesures absolues ou relatives et varient en fonction de leur destinataire et de leur objectif :

• La direction d'une entreprise aura besoin par exemple d'IPÉ bien plus synthétiques que les managers de l'énergie ou les responsables des systèmes.
• Les indicateurs absolus tels que les kWh/a sont généralement utilisés dans les communications externes pour décrire les tendances de consommation.
• Les indicateurs absolus sont également utilisés dans le cas de systèmes statiques.
• Dans le cas de systèmes dynamiques, il est important d'appliquer une valeur de référence qui facilite la comparaison avec la valeur mesurée (indicateur relatif).

Exemples d'indices de performance énergétique (IPÉ)

Le nombre d'unités produites (kWh/unités de produit*a) peut par exemple servir de valeur de référence pour les indicateurs de performance relatifs. La représentation sous forme de simple quotient ne fonctionne toutefois que s'il existe une seule variable pertinente et aucune charge de base: dans la pratique, ce n'est généralement pas le cas. La fonction de consommation d'énergie, déterminée en tenant compte des facteurs d'influence pertinents, constitue un meilleure IPÉ. La formule peut être directement extraite de l'analyse de régression. Si le système de gestion de l'énergie est nouvellement mis en œuvre, l'IPÉ déterminé est généralement identique à la situation énergétique de référence (SER). La SER constitue le point de référence d'un indicateur et doit être adaptée si des facteurs statiques changent (composition du parc d'installations, nombre d'équipes, etc.) La norme ISO 50006 contient de plus amples informations sur l'indicateur de performance et le point de départ.

La figure suivante montre un exemple de comparaison entre l’indicateur de performance énergétique (IPÉ) et la situation énergétique de référence (SER)  (axe Y) sur une année (axe X). Alors qu'en janvier et février, les deux valeurs sont encore identiques, la ligne IPÉ passe ensuite sous la ligne SER et une économie est visible. Une telle économie ne se produit généralement qu'après la mise en œuvre de mesures dans le cadre de la gestion de l'énergie.

Suivi énergétique

Les IPÉ sont d'une importance capitale car ils documentent et permettent de visualiser l'amélioration ou la détérioration de la performance énergétique par rapport à la situation énergétique de référence (SER). Ceci est réalisé en comparant les valeurs visées de consommation d'énergie aux valeurs réelles (IPÉ). Ce processus est connu sous le nom de suivi énergétique. Il permet aux entreprises de suivre leurs IPÉ, d'utiliser des méthodes de contrôle de l'énergie pour analyser de manière ciblée les écarts éventuels et d'initier des actions correctives tout en identifiant les optimisations potentielles. Un système de mesure basé sur un logiciel est le mieux adapté à cette tâche lorsqu'une entreprise atteint une certaine taille ou que sa consommation d'énergie dépasse un certain niveau.

Plan de collecte des données

Un plan de collecte de données (également appelé plan de mesure) sert à garantir des mesures et des calculs documentés, continus, cohérents et transparents. Il définit :

• quand (par exemple : quotidiennement, hebdomadairement…),
• quoi (par exemple : la consommation de gaz de l'usine 1),
• où (par exemple : le département 2),
• comment (par exemple : en utilisant un compteur spécifique, un calcul, une estimation),
• et par qui (par exemple : directeur de l'usine 1).

Le plan de collecte de données fournit également des informations sur : 

• les variables pertinentes pour les usages énergétiques significatifs (UÉS),
• la consommation d'énergie des UÉS et de l'organisation dans son ensemble,
• les critères opérationnels concernant les UÉS,
• les facteurs statiques (le cas échéant),
• les données figurant dans les plans d'action.

Plan d'action : définir les objectifs opérationnels

La norme ISO 50001 n'exige la collecte de données que pour les UÉS, définis préalablement par les entreprises afin que la charge de travail reste gérable. En pratique, un équilibre doit être trouvé entre les efforts et les avantages du plan de mesure. Des objectifs opérationnels et énergétiques concrets doivent être établis à partir de la planification stratégique et tactique afin d'améliorer les performances liées à l'énergie. Ces objectifs doivent toujours être SMART (spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis).

Définir des objectifs très précis (par exemple : réduire la consommation d'énergie par unité du produit X [kWh/unité] de 10 % par rapport aux niveaux de 2022 d'ici le 31/12/2024) permet d'évaluer les progrès et l'efficacité des mesures au niveau opérationnel. Chaque objectif doit être étayé par un plan d'action qui définit précisément comment l'objectif sera atteint. Un plan d'action bien formulé constitue également une base solide pour les demandes de financement, car la plupart des organismes de financement exigent un concept structuré.

Conclusion : vers une meilleure gestion de l'énergie

Le chemin est long entre une première analyse de l'état actuel et un monitoring énergétique professionnel. La bonne nouvelle : chaque étape du processus vous fait progresser. Vous comprenez les risques, comme les consommations d'énergie inutilement élevées ou le non-respect des lois, mais aussi les opportunités, comme les économies et les subventions. En identifiant les principaux usages de l'énergie et les facteurs influents, vous vous concentrez sur les consommations pertinentes et pouvez prioriser judicieusement les mesures correspondantes.

Grâce à des IPÉ pertinents, vous pouvez communiquer, tant en interne qu'en externe, l'état des lieux, les développements et les succès. Afin de suivre en permanence le statu quo et d'intervenir à temps, l'étape finale du processus de planification énergétique est élémentaire : le suivi énergétique continu sur la base d'objectifs SMART. La planification énergétique, comme la plupart des processus d'entreprise, est soumise à la même règle : il s'agit d'améliorer en permanence le processus avec toutes ses analyses et ses chiffres clés, ainsi que les résultats. La norme ISO 50001 vous fournit un bon cadre pour l'optimisation continue de votre gestion de l'énergie.